Arrêtons-nous quelques instants sur le site de Møsstrond. Les hellegryter découverts à Møsstrond, dans le Telemark, ont un foyer large de 45 à 70 cm de diamètre et haut d’environ 35 cm. La datation au carbone 14 indique une période d’utilisation allant de l’an 550 à l’an 800 environ. À cette époque le fourneau était constitué d’une cheminée de four et d’un trou à crassier récupérant les résidus de métal (cf. photo). On a longtemps cru que ces fourneaux en pierres alignés servaient à la production de fer. Pourtant une étude de l’Institut de technologie des matériaux d’Oslo a récemment découvert qu’un calcul du rendement mène à une valeur négative. Ceci s’expliquerait par le type de bois présent dans la région (du pin de faible altitude) et mal adapté à la fonte du fer. Cela veut donc dire que le hellegryte de Møsstrond ne pouvait pas être utilisé pour la production de métal ? Pourtant la région était connue pour son importante production, environ 20 tonnes par an entre 1100 et 1275 ap. JC. À quoi servait donc le site de Møsstrond ?
Quelque part entre l’an 600 et l’an 800, une nouvelle technologie avec des fourneau plus petit et percés sur les côtés fut introduite. Le nombre de fourneau datant cette période, incluant ceux de Møsstrond, est d’environ 10 000. Contrairement à la génération de fourneaux précédente, ceux-ci n’étaient pas chargés avec du bois mais avec du charbon de bois et étaient chauffés en envoyant de l’air par les ouvertures. Le type de bois utilisé n’était donc plus de première importance. L’énorme production de fer à Møsstrond après l’an 1000 est clairement liée à ce nouveau type de fourneau . L’hellegryte de Møsstrond n’était donc pas un site d’extraction du fer, comme c’était le cas ailleurs jusqu’au VIe siècle de notre ère. Møsstrond était en réalité le lieu où s’opérait un pré-traitement du minerai. Ce pré-traitement offrait une matière première d’excellente qualité pour la fonte en tant que telle. Le semi-produit était acheminé vers un autre site comme matière première pour une fonte conventionnelle dans les fourneau typiques de la période: une cheminée de four avec un trou à crassier comme on en a trouvé 20km plus loin.
Cette découverte prouve combien les anciens Scandinaves, en divisant le processus de production de fer en plusieurs étape, étaient devenu maîtres dans l’art de la fonte et avaient su l’organiser de manière géniale.